Étude de cas en pathologie clinique : Hyperglobulinémie sévère chez un chien
Informations contextuelles
Age : | 10 ans |
Sexe : | femelle châtrée |
Espèce : | canin |
Race : | Golden retriever |
Anamnèse : | perte de poids et d’entrain, et un épistaxis récent |
Examen physique
- Un examen physique n’a révélé aucune anomalie significative.
Résultats de laboratoire et interprétation
Un profil hémato-biochimique a été effectué. Les résultats pertinents incluent :
Biochimie
Protéines : | 116 | (55-75) | g/L |
Albumine : | 14 | (27-39) | g/L |
Globulines : | 102 | (24-40) | g/L |
Hématologie
Hématocrite : | 0.31 | (0.38-0.57) | L/L |
Réticulocytes : | 35.3 | (10-110) | 10E9/uL |
Plaquettes : | 296 | (143-448) | 10E9/uL |
Étant donné l’hyperglobulinémie marquée, une électrophorèse des protéines a été effectuée. Le tracé électrophorétique en haut de la page a été obtenu.
Interpretation: Le diagnostic le plus probable est un néoplasme sécrétant des immunoglobulines, tel qu’un myélome multiple ou un lymphome.
Discussion
L’électrophorèse des protéines sériques permet de séparer les fractions de protéines majeures en 6 catégories (voir fig. 2 – Électrophorèse normale). Les globulines alpha et bêta regroupent principalement les protéines positives et négatives de la phase aiguë, alors que les gamma-globulines se composent d’immunoglobulines (principalement les IgG).
Les renseignements les plus utiles se trouvent dans la région gamma. Lorsqu’une hyperglobulinémie est causée par une stimulation antigénique, les nombreux épitopes présents entraînent la synthèse d'une grande variété d’immunoglobulines différentes. Lors de l’électrophorèse, ces dernières présentent des patterns migratoires différents et elles s’étendent dans la région gamma pour former un tracé composé d’un ou plusieurs pics courts à base large ou coalescents. Il s’agit d’une gammopathie polyclonale (voir Fig.3 – gammopathie polyclonale). Cependant, lors de myélome multiple (une tumeur maligne des plasmocytes), ainsi que dans de rares cas de lymphome, les cellules néoplasiques sont toutes des clones de la même cellule anormale et elles synthétisent toutes la même chaîne d’immunoglobuline exhibant le même pattern migratoire. On observe alors en région gamma un pic unique, très haut et à base étroite : une gammopathie monoclonale (voir Fig.4 – gammopathie monoclonale).
L’électrophorèse de notre patient est compatible avec une gammopathie monoclonale. Un myélome multiple ou un lymphome est donc fort probable. Cependant, notez que les gammopathies monoclonales ne sont pas complètement pathognomoniques d’un néoplasme. En effet, la littérature médicale renferme quelques rapports de cas où une stimulation antigénique inhabituelle avait entraîné une gammopathie monoclonale, incluant notamment des cas d’ehrlichiose. Il est donc indiqué de poursuivre l’investigation pour confirmer le diagnostic de myélome multiple/lymphome. Un test Snap 4DX est recommandé afin d’exclure la possibilité d’ehrlichiose. Une évaluation des organes internes et des noeuds lymphatiques devrait ensuite être considérée. Notez que le diagnostic des myélomes multiples requiert la présence d’au moins 2 des 4 critères suivants : une gammopathie monoclonale à l’électrophorèse des protéines sériques, la présence de lésions ostéolytiques, la détection de protéines de Bence-Jones dans l’urine (c.-à-d. chaînes d’immunoglobulines monoclonales dans l’urine) et/ou une plasmocytose de la moelle osseuse (voir Fig 5 – Cytologie – Plasmocytose de la moelle osseuse).
Malgré un comptage plaquettaire normal, notre patient présentait une épistaxis, suggérant une coagulopathie de l’hémostase primaire (qui est souvent associée à une anomalie plaquettaire). Il s’agit d’une complication fréquente dans les cas d’hyperglobulinémie sévère, puisque les protéines enrobent les plaquettes et interfèrent avec leur fonction normale. Notez que l’hyperglobulinémie sévère peut aussi causer une hyperviscosité sanguine qui peut alors interférer avec la circulation sanguine dans les petits vaisseaux. Ceci peut causer une hypertension, des lésions ophtalmologiques et des signes neurologiques.
À propos de l'auteur
Sébastien Overvelde, DVM, MSc, DACVP
Natif de Sherbrooke, Dr Overvelde a reçu son DMV de l’Université de Montréal en 1998 et a ensuite travaillé dans une clinique pour animaux de compagnie à Newport News en Virginie pendant trois ans. Il retourne ensuite à l’Université de Montréal pour y compléter une résidence en pathologie clinique et une maîtrise en sciences vétérinaires. Dr Overvelde a obtenu sa certification de l’ACVP en 2004 et s’est joint à l’équipe de notre laboratoire de Montréal en novembre de la même année.
Dr Overvelde demeure à Laval avec son épouse et leurs deux fillettes. Leur famille comprend également 2 chats, un cochon d’Inde et plusieurs poissons. Ses passe-temps favoris sont le karaté, le kayak, la généalogie, la cuisine et la lecture.
Si vous avez des questions au sujet de ce cas ou vous souhaitez discuter du diagnostic, n’hésitez pas de communiquer avec l'auteur .
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Références :
- Feldman BF, Zinkl JG, Jain NC. Schalm’s Veterinary Hematology. 5e Édition. Lippincott Williams & Wilkins, 2000.
- Withrow SJ, MacEwen EG. Small Animal Clinical Oncology. 3e Édition. WB Saunders Company, 2001.
Tous les cas ont été suscités par des soumissions aux pathologistes d’IDEXX Canada à leur laboratoire régional.
Dans le but de protéger la confidentialité de nos clients et de leurs patients, les informations contextuelles de nos études sont légèrement modifiées.